Retour de récré 

D******** : Maitresse, R******* il m'a fait un cloche-pied ! 

La logique :

Goûter d'anniversaire, M******** nous montre une photo d'elle bébé avec sa grande soeur. Sur la photo, on voit un petit bébé et une petite fille tout sourire d'environ 4-5 ans. 

M******* : alors là c'est moi quand j'étais bébé (elle se montre), avec ma soeur (elle montre la petite fille de 4/5 ans).

T************* : c'est ta grande ou ta petite soeur? 

Initiation à l'escrime 

 G********* : Maitreeeeeeeesse, j'arrive pas à mettre mon casque avec mes lunettes ! 

A********* : On peut mettre le casque avec les lunettes ? 

G*********** : Mais oui, regarde, moi j'en ai !

(Il prend ses lunettes à pleine main, doigts sur les verres. Je sens le coup venir). 

Moi : G****** tu mets ton casque s'il te plait.

Mon vaillant escrimeur en herbe prend son casque, et essaye de l'enfiler par le haut (alors qu'il faut l'enfiler par le bas en cas de port de lunettes). 

Moi : Non, pas comme ça ! 

On bataille un peu, mais on réussit à coller la tête, le menton, le visage et les lunettes de G******** dans le casque (ne me demandez pas dans quel ordre). 

Moi : Ca va, ça tient, là? 

G************, tout content : Oh oui ! C'est chouette ! 

Je m'éloigne de trois pas ... quand soudain :

G*********** : Maitreeeeeesse, faut tout retirer, j'ai des traces de doigts sur mes lunettes ! T'a pas un mouchoir? 

-_-

Récréation 

Avant de partir en récréation, dernier rappel : "Les petits dorment en bas, donc on descend les escaliers en SILENCE et on passe devant la porte en SILENCE ! "

Tous : Oui oui ! 

Descente impeccable, pas un bruit. Arrivés devant la porte des petits :

A********** se met à hurler à N*********** restée dans les marches : N****** J'AI OUBLIE MON MANTEAU ! TU PEUX ME LE DESCENDRE ? 

Devant mes gros yeux, elle crie à N******* : MAIS FAIT PAS DE BRUIT, Y'A LES PETITS QUI DORMENT ! 

Lecture de la poésie 

Moi : A*********, peux-tu s'il te plait lire la poésie tout haut ? 

A***** commence à le faire. Et je vois les autres élèves le nez en l'air. 

Moi : Ouhou, le but c'est de lire en même temps que A***** (sous entendu : suivre le texte en silence pendant qu'elle le lit). A****, vas-y, recommence. 

A***** : La petite pomme 

Et les autres, en choeur  : la petite pomme ...

Lecture orale 

D******* : Maitresse, je peux lire le texte ? 

Moi : Oui, vas-y. 

D******* : Julie est contente car c'est son anniversaire, POINT. Elle mange du gâteau au chocolat, POINT. Ses meilleurs amis sont là, Virgule, ils lui donnent des cadeaux, Point. 

( On a eu un gros fou rire avec les autres élèves, mais on l'a laissé finir car elle était tellement sérieuse qu'il était impossible de l'interrompre en plein milieu. Au moins, elle connait sa ponctuation.) 

Grammaire 

Etude des groupes dans la phrase. Fin de la leçon, on récapitule ce qu'on vient de voir. 

Moi : M*****, quelle question pose-t-on pour trouver le premier groupe dans la phrase ? (réponse attendue : de qui on parle?")

M****** : Euuuuuh ... Maman accroche les guirlandes. 

A une semaine des vacances, faisons un petit point depuis le début septembre : 

Je suis totalement aphone. Du genre : j'ai terminé mon vendredi en mimant à mes élèves ce que je voulais leur dire. J'ai chanté "on écrit sur les murs" en mode métal hard core. J'ai fait le pot d'inauguration de l'école en papotant avec mes collègues avec la voix de Jeanne Moreau. J'ai passé une soirée avec mes amis en agitant la main quand je voulais parler. Et eux, adorablement, ont fait le silence complet pour écouter, parce que ma voix n'était plus qu'un tout petit filet (aka j'ai les meilleurs amis de la terre). Aujourd'hui dimanche, je n'ai toujours pas de voix. Je croise les doigts pour la retrouver avant demain.

J'ai découvert  mon côté un peu Grimlins envers ceux qui m'enquiquinent. Je n'ai pas encore bouffé le Père Noël ni fait exploser le micro-onde du bahut, mais j'ai des moments un peu ronchons. Tout en restant un peu trop bisounours sur les bords.

Je découvre les joies du stress en arrivant à l'école et en se demandant quelle calamité va encore nous tomber dessus. Si je n'ai pas oublié un truc sur la liste de 4km de long qu'on a a faire à côté de la préparation de cours. Entre les rdv de psy scolaire, la réservation des sorties, les demandes de devis, les réponses de mots aux parents, les distributions de mots aux parents (jusqu'à 3 dans la journée), les contrôles de réponses des parents aux-dits mots, les listes diverses et variées, les réunions, les tableaux à rendre, les calculs des heures et j'en passe. Et au passage, gros big up à mes collègues qui préparent des projets et qui gèrent ça d'une main de maitre. J'en reste baba. J'arrive à peine à corriger mes fichiers de maths.

J'ai appris à faire du café avec la machine. Wonderful ! 

Mes élèves sont choupinous. On s'apprivoise de plus en plus et la dynamique de classe comment à se roder. Je suis très fière d'eux et je n'hésite pas à leur dire. 

La piscine reste un concept très vague (hu hu hu... hum...). En théorie, on avait 12 séances, en pratique on en a eu 3. Le savoir nager, ça sera pas pour cette année. 

Je réussi petit à petit à grapiller des heures de détente. Aujourd'hui dimanche, j'ai terminé de bosser à 15h30. Au lieu de 18h30. Allez, on y croit ! 

Je commence à m'organiser. Un tout petit peu. Je vois mes erreurs. Je vois ce qui fonctionne. Ou pas (beaucoup de "ou pas"). Je reste optimiste, ma deuxième période va être plus organisée (ceux qui se roulent de rire dans le fond, je vous vois!)

Les dolipranes sont devenus mes meilleurs amis. Voir mon aliment principal. Mais le chocolat reste indétrônable. 

J'ai pleuré. Beaucoup. Longtemps. J'ai douté. J'ai déprimé. J'ai désespéré. J'ai crisé. J'ai organisé des trucs pour la classe qui n'ont pas marché. Je me suis cassé la figure. Beaucoup de fois. J'ai sacrifié mon temps personnel. Mais je préfère oublier. Je garde les fous rires, les discussions du midi, les succès, les sourires, les perles de mes élèves, mes petits rituels perso rythmant ma semaine, l'expérience acquise petit à petit et les supers conseils et coups de main de mon entourage et de mes collègues. 

Et je me rends compte 1) qu'il me reste du boulot 2) qu'au final, je passe des chouettes journées, quand un de mes élèves vient me voir en souriant "Maitresse, ça passe trop vite quand même l'après-midi!" ... et que je réponds "Oui, surtout qu'on est le matin..."

Quand tu es maitresse bisounours et que tu n'as encore jamais vécu de réunion de rentrée à proprement parler (ma première a été faite conjointement avec ma super binôme, du coup c'était passé comme une lettre à la poste), tu spécules. Tu fais ton petit papier, avec les différents points à aborder, et 5mn avant, tu as l'impression de passer un énième oral devant un jury.

Ajoutons à cela que je fais quand même un peu plus jeune que mon âge, un peu le stéréotype de la petit blonde qui débute, et que niveau caractère je suis plus du genre tout sourire et pas très grande gueule. Combo gagnant pour se faire bouffer, mais ne vous inquiétez pas, j'y travaille.

Comme toujours, il y a la théorie et la pratique. La théorie, c'est : tu distibues un petit papier dans le cahier de liaison,  annonçant la date et l'heure de la réunion. 95% des parents signent et disent "oui oui, pas de soucis, on sera là". Olalala, mais je vais faire salle comble !! 

En pratique : ma première année, on a eu 7 parents sur 25. Cette seconde année, j'ai été un peu plus populaire : 12 parents sur 20. Un très bon score. Presque tous sont venus en Ce1, pratiquement aucun en Ce2. Pas graaaaave, la réunion commence. Et là, tu vois les tendances se dégager (bien entendu, je parle en général)

La maman égocentrique qui ramène tout à son enfant : "ah vous n'affichez pas les poésies? Moi ma fille apprend mieux quand la poésie est au mur, vous devriez la mettre, ça serait plus visuel." 

La maman qui te donne des conseils : "Vous avez un niveau CE... excellent, vous devriez les faire plus travailler." (de 1: sympa pour les parents de l'autre niveau présents. De 2 : Vous devez avoir des capacité de voyance ou d'invisibilité car je ne vous vois pas dans la classe quand je fais cours, en revanche pas de soucis pour juger à ma place les élèves !)

La maman qui te fait comprendre que le groupe de Ce..... est un clan, rapport à la réflexion ci dessus : "Bin oui, ils se connaissent tous depuis la maternelle et nous aussi du coup, on se connait tous, donc vous comprenez, on sait de quoi ils sont capables, on les connais par coeur." (moment où tu as l'impression de te retrouver en face d'une armée d'orques capables de te piétiner si tu fais un pas de travers).

La maman qui remet en cause ta compétence : "Et vous comptez leur faire faire le programme à un moment donné? Parce que là, ils revoient l'année précédente". (Non madame, je vais plutôt leur faire coller des gommettes). Ce à quoi tu réponds en souriant "vous savez, ils ne sont pas tous au même niveau et cette période est pour moi l'occasion de connaitre leurs capapcités." (sous entendu : lâche-moi avec ton enfant, il n'est pas le centre de ma classe, j'en ai une en Ce2 qui colle les feuilles de leçon dans son cahier de liaison.) 

La maman papparazzi qui prend tout en photo : le cahier de son fils, le programme au mur, la bibliothèque, les affiches ...

La question des devoirs : "Non, mais vous ne leur donnez pas assez de devoirs, ça prend 5mn le soir. Avant il y avait la lecture, les leçons, la poésie c'était mieux." Ok, pas de soucis. Viens pas te plaindre après s'il y a trop de choses. 

La maman qui pinaille : "Et le système de bon points? Et l'organisation de la lecture en classe? Et le passage aux toilettes?" 

La maman qui approuve tout ce que tu dis (Rare !!) => celle-là je la chouchoute! 

La maman qui vient te supplier de donner pleiiiiiiin de travail à sa fille car elle s'ennuie. 

La maman qui tente de faire celle qui a compris le système : "Bon, au niveau de l'objectif final et de la compétence finale, ça se passe comment en fin d'année? " (Euuuuuuuh moi pas comprendre, car à chaque matière il y a des compétences et des objectifs différents)

Le groupe de mère qui se connait et qui te fait comprendre qu'elle connaissent mieux le métier que toi, que c'était mieux l'année dernière et que leur enfant est tellement bon qu'il va falloir mettre les bouchées doubles, cocotte, car tu n'as pas n'importe qui dans ta classe.

La maman qui ne t'écoute pas et qui fouille dans le casier de son enfant pour sortir tous les cahiers et inspecter millimètre par millimètre. 

La maman super gentille qui demande juste des petites précisions mais pas trop pour pas m'embêter (love love love)

Les parents qui te disent que leur enfant se plait bien dans la classe et que ça se ressent.

Le moment des sorties scolaires : Tous les carnets s'ouvrent, tout le monde compulse son agenda et je vois presque les rouages tourner dans les têtes pour voir quand ils pourront me dire "pas de problème je VEUX accompagner."

Le moment piscine où tu annonces qu'elle est fermée et qu'ils râlent tous car au final ça ne sert à rien que les enfants y aillent. (pas taper, ce n'est pas moi qui ai fait écrouler le toit).

Les cancans qu'il faut tout de suite stopper : "oui y'a des parents dans l'autre classe qui ...." Stooooop on revient à MA classe. 

Au final, on ressent bien le double niveau : les parents  dans l'ensemble assez positifs et contents et ceux qui remettent en cause ta manière de fonctionner parce que leurs enfants sont excellents et qu'il faut les faire bosser et qu'ils sont sortis de la cuisse de Jupiter et que tu leur fait revoir des notions anciennes etc ... bref le bon gros manque de confiance. 

Ca va être comique, cette année. 

(Y'a pas de doute, je sens que je vais apprendre à l'ouvrir ^^)